En cette Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, le Mouvement contre le viol et l'inceste se souvient des femmes courageuses qui ont lutté contre l'oppression et qui se sont soulevées dans l'adversité.
Souvenons-nous des pionnières de ce mouvement féministe, les Sœurs Mirabal, qui ont été assassinées le 25 novembre 1960 par le régime Trujillo en République Dominicaine, pour s’être opposées à la dictature de Rafael Trujillo (El Jefe). Les Sœurs Mirabal sont un symbole de la résistance féministe.
Les deux dernières années se sont avérées incroyablement difficiles à travers le monde, et le fardeau de l'isolement et du confinement a été particulièrement difficile pour les femmes. Selon ONU Femmes, depuis le début de la pandémie, « tous les types de violence à l'égard des femmes et des filles, en particulier la violence domestique, se sont intensifiés ». Ce pic est surnommé La pandémie de l'ombre, car il a ciblé et mis en danger des femmes enfermées chez elles et sans recours. Nous ne pouvons toutefois pas prétendre que la violence à l'égard des femmes est une conséquence de la pandémie. Les circonstances actuelles n'ont fait que forcer l'attention du public vers un problème déjà croissant.
À ce jour, l’année 2021 a enregistré 17 féminicides au Québec. Plusieurs ont fait part de leur tristesse et de leur choc devant le nombre croissant de meurtres, y compris nos autorités provinciales qui « n'arrivent pas à croire que cela se passe ici, au Québec ». Pour ceux qui menaient cette bataille bien avant ces deux dernières années, la montée de la violence envers les femmes n’est pas une surprise, mais bien un réveil brutal pour ceux qui l’ignoraient.
Sur les 17 féminicides survenus au cours de la dernière année, un seul n'est pas une conséquence directe de la violence domestique. Ce sont des vies qui auraient pu être sauvées. Nous les commémorons, nous nous souvenons d’elles et nous les honorons alors que nous continuons à lutter vers un avenir meilleur pour nous-mêmes et pour les générations futures. Il est important de se rappeler que ce n'est pas un problème de région ou de province, c'est un problème mondial ; un que nous devons aborder. Au Canada, une femme ou une fille est violemment tuée tous les 2 jours et demi. Pourtant, il semble que le plan d'action national est insuffisant pour lutter contre les violences sexistes.
Le problème de la violence faite aux femmes devient d'autant plus ahurissant lorsqu'on considère l'impact significatif qu'elle a eu sur les femmes autochtones. Les disparitions et les meurtres actuels de femmes autochtones sont à la fois un féminicide et un véritable génocide. Selon l'Encyclopédie canadienne, bien qu'elles ne représentent que 4 % de la population féminine canadienne, les femmes autochtones sont 12 fois plus susceptibles d'être tuées ou de disparaître que les autres femmes au Canada. En 2013, la GRC a lancé une enquête qui a révélé qu'entre 1980 et 2012, un total de 1181 femmes autochtones ont été assassinées ou portées disparues. En 2013, 164 femmes autochtones ont été portées disparues. Ce nombre représente 11,3% de toutes les femmes disparues au Canada, un nombre horrifiant lorsqu’on considère qu’elles ne représentent qu’un petit pourcentage de la population féminine. C’est encore plus choquant de réaliser que les 1017 femmes autochtones assassinées représentent 16% de tous les féminicides au Canada.
La violence envers les femmes autochtones est un enjeu féministe, mais également un enjeu lié au racisme et à la ségrégation coloniale. Comprendre l'intersectionnalité des oppressions est un outil fondamental dans la lutte pour l'égalité. Le MCVI émerge d’une conscience féministe qui prend racine dans nos convictions et nos valeurs qui s’opposent au patriarcat, au racisme et à l’impérialisme. Nous combattons toutes les formes d’oppression puisqu’elles reposent sur un ensemble de croyances, pensées, perceptions et valeurs qui justifient ces rapports de domination et de pouvoir sur l’autre. L’agression sexuelle est issue des rapports de domination, d’oppression et d’exercice de pouvoir des hommes envers les femmes et les enfants. Non pas uniquement parce qu’elles sont des femmes, mais aussi et particulièrement parce qu’elles sont des femmes de couleur, issues de groupes racialisés, qu’elles sont pauvres, lesbiennes, autochtones, immigrantes, réfugiées ou parce qu’elles vivent avec un handicap ou une déficience intellectuelle. Ces femmes et ces enfants deviennent ainsi la cible de l’expression des autres sources d’oppression entrecroisées au patriarcat.
Le problème auquel nous sommes confrontés est certainement complexe, par conséquent, il ne peut pas être abordé ou résolu d’un seul côté. À vrai dire, ce n’est pas la responsabilité des survivantes seules de régler le problème. Il s’agit d’un effort collectif ; nous devons travailler ensemble pour bâtir un meilleur futur. Il est de la responsabilité des gouvernements provinciaux et fédéraux de développer une solution qui permettra d’offrir des services et des soins aux femmes qui sont continuellement ciblées. De plus, il est crucial qu'à l'avenir, nous n'offrions pas seulement de l'aide aux survivants, mais que nous prenions des mesures préventives par le biais de l'éducation et de la sensibilisation. Il faut régler les problèmes à la source, et pas seulement lorsque les dommages sont faits.
La question des violences sexistes peut sembler insurmontable. Notre société et nos systèmes semblent être construits pour s’adapter à une telle violence, mais tout n’est pas perdu. Par l'engagement collectif, le ralliement, l'activisme et l'organisation communautaire, nous pouvons apporter des changements considérables dans ce monde. Ensemble, nous pouvons transformer le système pour accueillir les personnes démunies, nous pouvons offrir de l'aide à celles qui en ont besoin et nous pouvons construire un avenir meilleur pour les femmes du Québec, du Canada et du monde.